CFP: De l’Antiquité à la modernité politique : quelles médiations ? La réappropriation de l'Antiquité politique à l'époque moderne (XVIe-XVIIIe siècles)

Appel à communications du Laboratoire Junior REPHAM (Représentations et

Exercice du Pouvoir : l’Héritage Antique à l’époque Moderne)

"De l’Antiquité à la modernité politique : quelles médiations ? La

réappropriation de l'Antiquité politique à l'époque moderne (XVIe-XVIIIe

siècles)"

 

ENS de Lyon

23-24 octobre 2017

Propositions: 15 février 2017

 

La redécouverte de l'Antiquité effectuée par la Renaissance a eu un impact

décisif sur l’élaboration de la politique moderne, dès la fin du XVe

siècle. Des Discours sur la première décade de Tite-Live de Machiavel à la

vogue antiquisante de la Révolution française, l’Antiquité constitue une

référence récurrente en matière politique – mais cette constante présente

différents visages selon les contextes et surtout les médiations à travers

lesquelles elle est appréhendée.

 

En effet, la représentation de l’Antiquité s’avère instable, car la

connaissance que l’on en a, aujourd’hui comme à l’époque moderne, est

principalement indirecte, et par définition fragmentaire. Elle connaît des

variations considérables selon les sources considérées – parfois

archéologiques, pour l’essentiel textuelles, qu’elles soient littéraires,

historiques ou juridiques. Comment ces différentes sources sont-elles

convoquées ? Selon les sources et la perspective adoptée, l’Antiquité

permet de penser différents aspects du politique. C’est l’élaboration même

de ce statut complexe que nous souhaiterions éclairer en examinant le

rôle, capital, que jouent les différentes médiations par lesquelles

s’ouvre l’accès à l’histoire et aux textes antiques : éditions,

traductions, citations, transmission indirecte à travers d’autres œuvres.

 

Ces médiations ne vont pas de soi : ainsi, c'est le plus souvent à travers

les éditions établies par les humanistes de la Renaissance que les

écrivains politiques des XVIIe et XVIIIe siècles lisent les textes de

l’Antiquité. Certaines notions historiques antiques, par ailleurs, sont

essentiellement connues par le biais de relectures et de réinterprétations

modernes – ainsi, les XVIIe et le XVIIIe siècles connaissent la théorie

polybienne de la constitution mixte et de l’anakuklôsis autant par le

biais des relectures qu’en a faites l’humanisme civique du XVIe siècle que

par une lecture directe du texte d’origine. Il faut également examiner ce

qui est considéré comme une source politique à l'époque moderne : si les

sommes de Platon et d’Aristote constituent une référence majeure, l’œuvre

de Plutarque, aussi bien les Vies parallèles que les Œuvres morales, est

abondamment citée dans plusieurs écrits politiques au cours de la période

étudiée.

 

L’appropriation de l’héritage politique antique ne se limite cependant pas

à la reprise de thèmes, d’exemples ou de notions : elle se manifeste

également dans la pratique. Souvent, les références antiques servent de

catalyseur pour penser de nouvelles formes concrètes de la politique, ou

d’instrument à l’aune duquel mesurer la solidité des institutions

existantes. Les figures de l’histoire antique sont érigées en exemples ou

en repoussoirs, passant parfois de l’un à l’autre statut (ainsi, la figure

de Tibère fait l'objet d'une réappropriation complexe au XVIIe siècle).

C’est également à partir de notions empruntées à l’Antiquité (au premier

chef celle de « cité ») que s’élabore l’idée d’État moderne. Réfléchir sur

l’appropriation politique de l’héritage antique à l’époque moderne, c’est

donc aussi, bien souvent, éclairer le rapport entre théorie et pratique

politique : le retour à l’Antiquité correspond-il toujours à l’intention

d’influer sur la pratique politique, comme c’est le cas chez Machiavel ?

Comment le pouvoir peut-il mobiliser telle ou telle référence

antique comme support de légitimation ?

 

L'héritage antique s’avère protéiforme également dans la forme même à

travers laquelle il est appréhendé. La forme d’écriture choisie

conditionne la représentation politique de l’Antiquité, qui varie selon

qu’elle se déploie dans un discours politique, un traité juridique, un

essai, ou diverses formes littéraires (en particulier les textes

dramatiques). Ces formes connaissent des succès divers au fil du temps :

d'anciennes retrouvent un nouveau souffle à l'époque moderne – comme, par

exemple, le dialogue platonicien au XVIe siècle –, de nouvelles font leur

apparition et connaissent une vogue qui leur est toute particulière –

comme les « miroirs du prince » du début du XVIIe siècle. Outre la

question de l’adéquation d’une forme à une réflexion d’ordre politique (y

a-t-il des formes plus fondamentalement et essentiellement politiques,

donc plus aptes à penser le politique, que d'autres ?), cette évolution

nous amène à nous interroger sur leur inscription dans le temps : le

contexte historique suffit-il pour expliquer l’emprunt à l’Antiquité de

certaines formes plutôt que d’autres ? L’Antiquité est-elle plus présente

dans certaines formes que dans d’autres ?

 

L'objet même du colloque, qui se propose d'envisager différentes formes

d'écriture politique, appelle une démarche fondamentalement

interdisciplinaire : les propositions provenant de plusieurs champs

d’études (études littéraires, philosophie, histoire, histoire du droit)

sont les bienvenues. L'étude de textes français sera privilégiée, mais

cela n'exclut en rien toute proposition étudiant une source européenne.

 

Les propositions de communication (500 signes maximum), accompagnées d'une

courte biographie précisant l'institution de rattachement de l'expéditeur,

sont à envoyer avant le 15 février 2017 à Flora Champy

(fchampy@phare.normalesup.org) et à Caroline Labrune

(caroline.labrune@normalesup.org).